«L'élevage engage!»

Designer de matériel pour l'élevage

Publié le 21 avril 2025

  • Conception et réalisation de la vidéo: Marcel Barelli
  • Documentation et texte d'accompagnement: Observatoire du spécisme

Épisode #3 de notre série d'animation consacrée aux aspects méconnus de l'élevage

La série d’animation L’élevage engage!, issue de la collaboration entre le cinéaste suisse Marcel Barelli et l’Observatoire du spécisme, propose un regard aussi caustique que factuel sur les coulisses de l’élevage en Suisse. En complément, un article sourcé présente chacun de ces thèmes.
Rendez-vous lundi prochain pour le dernier épisode de la série!

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Le matériel pour l'élevage

Chaînes, barrières électriques, abreuvoirs, caillebotis, racleurs à lisier, râteliers, box, mangeoires, étiquettes, bagues, meules à dents, bracelets et colliers de marquage, tasers, écorneurs, tondeuses, gants de traite, tabliers, entraves, seaux, cuves, biberons, pinces, coupe-onglons, harnais, cages de retournement, cages de pesage, crochets, filets, nourrisseurs automatiques, citernes, cuves, épandeurs, sangles, casques anti-bruit, remorques, bétaillères, pistolet d’abattage, etc. Cette liste, loin d’être exhaustive, du matériel conçu et utilisé pour exploiter les animaux non humains donne le vertige. Elle souligne l’ampleur et l’intensité de la contrainte nécessaire tout au long de l’existence d’un individu afin qu’il produise ce qui est attendu de son corps.

L’élevage est en effet un système élaboré de contraintes, fonctionnant grâce à un dispositif qui, si il est souvent méconnu, constitue pourtant la facette la plus matérielle de l’exploitation animale. Les rapports d’élevage requièrent une quantité phénoménale d’outils pour faire naître les animaux, les faire grossir, les forcer à se reproduire, les emmener à l’abattoir où ils sont mis à mort. Certaines manipulations, comme la castration, l’écornage ou l’insémination sont invasives ou violentes, et nécessitent de concevoir du matériel spécifiquement dédié à l’immobilisation des individus. Imaginer les processus d’élevage, concevoir, dessiner et modéliser en 3D, faire des prototypes, les tester puis fabriquer le produit: tel est donc le travail de l’ombre réalisé par des entreprises faisant office à la fois de bureau d’étude et d’équipementier.

Voici un tour d’horizon non exhaustif d’outils «emblématiques» utilisés pour exploiter les animaux.

Cornadis et cages de contention

Présent dans toutes les exploitations et adapté selon l’objectif de contrainte, le cornadis est un dispositif indispensable à l’élevage. Sous sa forme la plus simple de barrière métallique, il est l’outil central de l'enfermement des animaux dont l’espace de vie est entièrement défini par les besoins de l’industrie (Busslinger, 2019).

La cage de contention est une structure métallique qui immobilise complètement l’individu. Celle-ci est employée pour entraver toute tentative de résistance ou de fuite lors de manipulations sur le corps des animaux, à l’instar de la brûlure des cornes ou du fixage d’anneaux nasaux pour les vaches et les taureaux. Le dispositif employé pour tuer les bovins dans les abattoirs est aussi similaire aux cages de contention (Charrière, 2020).

Anneau anti-têteur

L’anneau anti-têteur est composé de piques et se fixe dans le nez du veau, entre ses deux narines (Rovagro, 2025). Ce dispositif est utilisé dans le but d’empêcher le bébé de boire le lait de sa mère, celui-ci étant destiné à l’industrie laitière. Lorsque le veau essaie de téter, les piques frottent contre les mamelles de la vache, qui le repousse alors pour éviter de subir cette douleur.

Pistolet d'insémination

La méthode la plus couramment utilisée aujourd’hui pour pratiquer l’insémination artificielle des vaches ou des truies consiste à insérer une longue tige munie de semence jusqu’au col de l’utérus avec une main, tout en guidant cette tige par le biais d’une fouille rectale avec l’autre bras. L’insémination artificielle est une pratique peu connue mais indispensable à la production de viande et de produits laitiers (Schretr, 2024). Privilégiant toujours la réduction des coûts, l’industrie de l’élevage a conçu une nouvelle technologie: le pistolet d’insémination avec caméra intégrée (AXCE, 2024). Il permet à l’éleveur·euse, moyennant une petite formation, de procéder soi-même à l’insémination, et donc de ne pas recourir aux services d’un·e inséminateur·ice professionnel·le, qui pratiquait jusque-là l'insémination au toucher.

Ces inséminations sont réalisées de force sur les vaches. Alignées dans des cages de contention, elles ne peuvent ni se débattre, ni fuir. Elles sont condamnées à enchaîner les grossesses, et la séparation d’avec leurs petits qui s’ensuivent, jusqu’à ce que la diminution de leur fertilité, et donc de leur rentabilité, ne les destine à un nouvel usage: la consommation de leur chair. Elles sont alors transportées à l’abattoir.

Dispositif de castration des porcelets

Un dispositif a été conçu spécifiquement pour maintenir les porcelets dans une position qui permet de leur sectionner les testicules (Kerbl, 2024). Il s’agit d’un large entonnoir métallique dans lequel la tête est enfoncée de façon à immobiliser le porcelet la tête en bas (Elevage-suisse.ch, 2022). Complètement généralisée, cette pratique est défendue par le monde de l’élevage sous prétexte qu’une partie des cochons non castrés, une fois morts, dégagerait une odeur trop forte à la cuisson (Boder, 2000). La castration est également pratiquée dans le but de réduire les comportements agressifs des cochons aliénés par l’enfermement et la surpopulation. La castration se fait généralement par incision de l’épiderme et prélèvement des testicules à l’intérieur du scrotum. En Suisse, elle doit se faire sous anesthésie, mais la méthode est dénoncée comme peu efficace (Parlement.ch, 2022). Un vaccin a été développé comme alternative non douloureuse à la castration, mais la filière industrielle la refuse, arguant que le goût de leur chair n’aurait pas un aussi bon goût.

Spray anti-cannibalisme et anti-agressions

De nombreux types de sprays servent à empêcher les animaux confinés de s'entre-dévorer. Les conditions de vie dans les élevages porcins sont si violentes qu’elles altèrent les comportements des cochons, engendrant notamment du cannibalisme. Enfermés dans des enclos surpeuplés et avec pour seule source de distraction une chaîne à mâchouiller, les cochons en viennent à mordiller ce qui se trouve à leur hauteur: les queues de leurs congénères. Dans un souci de productivité, sans se soucier d’améliorer le stress, l’ennui et la souffrance des animaux, la filière de l’élevage favorise les solutions les plus rentables: des sprays anti-cannibalisme ou encore la caudectomie (l’ablation de la queue). Ces sprays hautement toxiques sont appliqués directement sur la peau de cochons, principalement sur et autour de la queue, pour donner une odeur répugnante à leurs congénères et les en éloigner (Kerbl, 2024).

Références

AXCE. Eye breed insémination. Consulté le 13 février 2025.

Boder, W. (2000, 23 mai). Une interdiction de la castration des porcs bouleverserait le marché de la viande. Le Temps. Consulté le 13 février 2025.

Busslinger, B. (2019, 22 septembre). Discussion climatique avec un engraisseur de taureaux. Le Temps. Consulté le 13 février 2025.

Charrière, J.-M., (2020). Les Vaches pleurent: dans les coulisses des élevages. Nature libre.

Elevage-suisse.ch. (2022). Comment sont reproduits les porcelets en Suisse.
Consulté le 13 février 2025.

Kerbl. Spray anticannibalisme No Bite. Consulté le 13 février 2025.

Kerbl. Appareil à castrer. Consulté le 13 février 2025.

Parlement suisse. (2022, 16 juin) 22.3725. Postulat: Castration des porcelets sans anesthésie à l'isoflurane. D'autres solutions sont-elles possibles?

Rovagro. Anneaux antitêteurs. Consulté le 13 février 2025.

Schretr, N. (2024, 30 mars). Dans l’élevage laitier, le sperme de taureau vaut de l’or. Le Temps. Consulté le 2 avril 2025.


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